L’overtrading est un effet méconnu de beaucoup des managers et pourtant très redoutable. Un poison lent mais puissant. Dans certains cas, comme dans celui de plusieurs autres évaluations pour ceux qui essaient de le mitiger, on évalue ce risque à l’approche d’un changement majeur et on oublie de le surveiller afin de le détecter avant qu’il ne produise des effets néfastes pour l’entreprise.
C’est quoi alors l’overtrading ? Pourquoi comporte-t-il un aspect particulier dans le contexte d’un pays sous-développé comme la République Démocratique du Congo ? Quelle serait la bonne attitude pour ne pas tomber dans ce piège ? Nous allons essayer de répondre à chacune de ces questions.
- L’overtrading
Vous avez surement entendu parler d’un dicton qui dit « La façon la plus rapide d’attendre sa destination est d’y aller lentement » en angalis « slowly is the fastest way to get where you wnat to be » . Ce dicton prend tout son sens dans le phénomène de l’overtrading. L’overtrading est une situation dans laquelle une entreprise connait des grandes expansions, des grandes croissances en termes de chiffre d’affaire sans avoir les ressources adéquates pour supporter cette croissance ou une inadéquation survenue entre le niveau d’activités et les ressources quand celles-ci diminuent.
En quelques sortes, c’est un effet contre-nature. Les ressources qui peuvent manquer à l’entreprise pour répondre au niveau d’activité sont les ressources financières, les capacités de production, la compétence des personnels clés, les ressources humaines… L’overtrading peut provenir d’un effet de marché comme une croissance de la demande liée à un effet de saisonnalité, une croissance brusque de la demande liée à un changement structurel… ou en interne, comme la perte des personnels compétents non adéquatement remplacés, une diminution de la capacité de stockage ou la capacité de production, la disparition d’une source de financement.
Les signes les plus usuels qui indiquent un malaise et font appel à un diagnostic sont :
- Une rapide croissance du niveau de vente ;
- Une diminution de la marge ;
- Des problèmes récurrents de cashflow ;
- Une augmentation du ratio d’endettement de l’entreprise et des frais financiers y afférents ;
- Des problèmes récurrents de stock et de paiement des dettes ;
Le contexte des pays sous-développés
La structure économique, le marché et le contexte dans lequel évolue une entreprise ont un impact réel sur sa compétitivité et la contrainte à mieux se structurer. Un environnement équitable, compétitif et organisé force les entreprises à acquérir certaines compétences et atouts avant d’espérer en retour avoir une croissance ; de ce fait moins exposées au phénomène d’overtrading.
N’oublions pas que nous avons définit l’overtrading comme une inadéquation entre le niveau d’activité et les ressources de l’entreprise. Si dans certains cas, cela provient des faits susmentionnés, dans le contexte des pays sous-développés il faudra ajouter notamment :
- Les politiques d’incitation à l’investissement local mal planifiées et mal exécutées
Dans le soucis de voir leurs économies évoluer et le niveau des vies des populations s’améliorer, les pays en voie de développement mettent en place des politiques qui encouragent l’entrepreneuriat local espérant une meilleure redistribution de richesses.
Si ces politiques sont vivement souhaitées pour leurs apports au développement, il faudra néanmoins constaté que lorsqu’elles sont isolés des prérequis importants, elles produisent l’effet inverse à celui souhaité.
En effet, nous avons à titre d’exemple vécu la zaïrianisation en République Démocratique du Congo ; cette mesure qui consistait en 1973 à nationaliser les propriétés commerciales et foncières pour ensuite les redistribuer aux nationaux. L’impréparation, peu après l’indépendance, a fait porter à la mesure les germes de son échec. Une autre tentative est celle de l’autorité de Régulation de la Sous-traitance dans le secteur Privé (ARSP) qui peine à produire les résultats escomptés.
Ces politiques lorsqu’elles ne sont pas bien planifiées donnent des avantages économiques non mérités à des personnes non préparées et non formées. Cette inadéquation entre les compétences et les aptitudes des bénéficiaires et leur niveau d’activité artificiellement accru est un phénomène d’overtrading dont les risques devaient être évalués et mitigés.
- La culture du népotisme, de la corruption et du clientélisme
Une entreprise d’un pays sous-développé peut voir ses activités croitre rapidement de manière artificielle dans des situations de concurrence déloyale. Lorsque l’augmentation d’activité d’une entreprise est le résultat de non-paiement d’impôts, des avantages accordés non concurrentiels et du positionnement politique ; il est fort et plus que probable que cette croissance ait été acquise sans expertise, sans la structure organisationnelle, logistique et matérielle capable de soutenir ce niveau d’activité.
Dès lors, nous serons dans un cas de figure où l’entreprise et les actionnaires sont très heureux de voir leur chiffre d’affaire croître avec un système de trésorerie boiteux et basé sur les urgences, la qualité des services et des produits qui ne suivent pas et en perpétuel déclin, des faibles politiques managériales en terme de gestion du cycle d’exploitation, credit control…jusqu’au jour où la machine va s’arrêter à cause d’un endettement insupportable, des pertes sur les créances importantes, des charges financières bancaires asphyxiantes. Il s’agit encore là d’un cas de overtrading.
- La structure sociale et économique
Il faut prendre conscience très tôt de la structure sociale et économique de l’environnement des pays sous-développés. Le déficit d’infrastructurel peut se poser comme une contrainte qui ne permet pas un certain niveau d’activité, la lourdeur administrative des services publics, les compétences disponibles, l’expertise disponible… doivent à tout moment être évalués par rapport aux opportunités de croissance.
Un entrepreneur avisé aura une politique claire en termes de formation de ses employés pour combler le déficit produit par une éduction universitaire plus souvent déconnectée de la pratique, des investissements compensatoires face au déficit de l’investissement public, il saura quand s’arrêter et se préparer pour mieux avancer. Tout est une question de timing, sans quoi il se trouvera probablement dans un cas d’overtrading.
La bonne attitude à avoir
Nous allons bien étendu commencer par déconseiller tous les antivaleurs, car tout bénéfice qui en provient est certainement de courte durée.
Nous suggérerons aux entrepreneurs de se faire accompagner dans leurs croissances par des spécialistes en conseil pour à la fois :
- Définir les objectifs en accord avec leur vision ;
- Définir la stratégie cohérente en terme d’activités et des ressources afin d’atteindre les objectifs fixés après une analyse de l’environnement externe et interne de l’entreprise ;
- Mettre en place un bon système d’évaluation des risques en intégrant selon les circonstances celui de l’overtrading ;
- Mettre en place un bon système d’information, idéalement une ERP, comme SAP, qui permette d’avoir un tableau de bord et faire un monitoring des activités ;
- Adopter les bonnes pratiques de management par une amélioration continue en accord avec les risques et le niveau d’activité.
